L’expérience « Yeux bleus – yeux marron » de Jane Elliott

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L’expérience « Yeux bleus – yeux marron » a donné naissance à une méthode dans la psychologie sociale. Celle-ci se base sur l’établissement de différences entre des sujets pour créer deux groupes distincts. C’est une technique -utilisée notamment par Jane Elliott- qui sert à démontrer combien de traits différents sont nécessaires pour créer des groupes définis et à partir de là, analyser le comportement des sujets.

À la fin des années 1960, les États-Unis traversent une crise sociale et notamment discriminatoire. Jane Elliott, institutrice, mène ainsi une expérience en se basant sur le paradigme de la minorité que ses élèves ne seraient pas prêts d’oublier. L’idée était aussi simple que complexe : démontrer aux enfants qu’une différence établie de manière arbitraire pourrait les diviser et créer des tensions entre eux.

L’expérience de Jane Elliott

Jane Elliott, maîtresse et activiste anti-racisme, a mené l’expérience avec la classe dont elle avait alors la responsabilité. Elliott a établi arbitrairement que les élèves aux yeux bleus étaient meilleurs que ceux aux yeux marron. La maîtresse leur a délivré des bandes de tissu discriminantes aux élèves aux yeux bleus pour qu’ils les mettent autour du cou des élèves aux yeux marron.

La couleur des yeux

Avec quelques exemples basiques et arbitraires, Elliott a démontré que les élèves aux yeux bleus étaient meilleurs. Ces derniers, bien que surpris, ne se sont pas opposés à ces arguments. Ainsi, Elliott avait créé deux groupes :

  • Yeux bleus : ils étaient plus nombreux, ils se sentaient supérieurs et avaient le soutien de l’autorité (de la maîtresse). En outre, ils avaient déjà ressenti un certain pouvoir sur les élèves aux yeux marron en leur mettant les bandes de tissu
  • Yeux marron : c’était un plus petit groupe, dont les membres étaient identifiés par le fait d’être plus « bêtes et malheureux ». Ils n’étaient pas seulement inférieurs en nombre, mais ils avaient aussi l’autorité contre eux

La discrimination

Peu à peu, les conséquences de l’expérience se sont manifestées. Une différence aussi banale que la couleur des yeux, critère établi par l’autorité, a provoqué une brèche entre les deux groupes.

Les enfants aux yeux bleus ont commencé à traiter de manière agressive et péjorative les enfants aux yeux marron. Ces derniers ont commencé à ressentir la discrimination et le harcèlement de la part de l’autre groupe.

Comment s’exprime la discrimination ?

En temps normal, le fait qu’on nous appelle « yeux marron » ne devrait pas être une insulte. Mais dans cette classe, avoir les yeux marron était un signe d’infériorité. C’est pourquoi l’adjectif « yeux marron » était une insulte utilisée par les enfants aux yeux bleus. Ces derniers ont commencé à ne plus vouloir jouer avec ceux aux yeux marron et à les harceler constamment.

Le résultat de l’expérience

Les conséquences de cette division arbitraire ont même entraîné des violences physiques. En règle générale, les enfants se disputent et se battent mais cette fois, la couleur des yeux en était la raison.

C’est alors que le groupe d’enfants aux yeux marron s’est mis à dénoncer les abus en classe. Ils le faisaient dans une position de victimes, en supposant qu’ils n’auraient pas le soutien de l’autorité.

De l’école à la société

Il est difficile de ne pas remettre en cause les rôles dans la société. Si une différence arbitraire a créé tant de problèmes dans un groupe d’enfants, que se passe-t-il à une plus grande échelle et en prenant en compte les stéréotypes que nous avons ?

Il n’est pas surprenant que différents groupes sociaux en méprisent d’autres sur des critères de différences ethniques, religieuses ou culturelles. Ces différences ont mené à des guerres et à de la haine entre amis et proches, qui vivaient parfaitement ensemble avant l’établissement de telles différences.

Une question d’éducation

Jane Elliott a réfléchi aux conséquences du paradigme de la minorité. Il est intéressant de souligner que les enfants étaient auparavant aimables, coopératifs et gentils. Ils sont ainsi devenus arrogants, discriminants et hostiles du fait de leur appartenance au groupe supérieur.

Les expressions de haine et de discrimination des adultes d’aujourd’hui ont pour origine une éducation qui leur a fait croire qu’ils étaient meilleurs que d’autres pour des raisons arbitraires, comme la couleur de peau ou le genre.

arbres en forme de tête

La minorité de nos jours

Ce paradigme nous aide à saisir les problématiques actuelles en ce qui concerne la discrimination. On connaît aujourd’hui de grands flux migratoires.

Souvent, les populations locales se sentent menacées et pour inverser ce sentiment, elles créent un sentiment de supériorité, parfois associé à des symboles particuliers. Ainsi, ce sentiment débouche rapidement sur des expressions de haine, telles que la discrimination raciale ou le terrorisme.

Le besoin d’une éducation sans discrimination

L’objectif de cette expérience est d’établir des différences subjectives, en créant un climat de favoritisme. C’est ainsi que le groupe dominant tirera le plus de bénéfices d’une situation, grâce au soutien de l’autorité. Tel que nous avons pu le constater, ce processus peut être si subtil qu’il nous échappe. Voici quelques pistes pour éviter ou réduire cet effet :

  • Naturaliser les différences : dans les contextes éducatifs, la naturalisation des différences superficielles entre enfants évite le sentiment de supériorité
  • S’adonner à des activités d’intégration : il est bon de mélanger autant que possible les individus qui présentent différents traits, différentes croyances et cultures dans une tâche commune
  • Considérer le rôle du maître : l’autoritarisme entraîne souvent le fait que le groupe le plus proche de l’enseignant a un certain sentiment de supériorité et de soutien. Le rôle du maître doit être de concilier plutôt que de discriminer.

L’expérience de Jane Elliott est importante pour démontrer la fragilité du vivre ensemble et comment des aspects arbitraires et clairement subjectifs peuvent entraîner des conflits chez des amis, des proches et des citoyens.

 

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